2004, discours de Mme Girardin à Houilles pour le bicentenaire de la mort de Schoelcher

Houilles, Yvelines (78)

La visite du ministre de l’Outre-Mer, Brigitte Girardin, et du ministre des relations du travail, Gérard Larcher, le vendredi 8 octobre 2004 Discours de Madame Brigitte Girardin, ministre de l’Outre-Mer.

BICENTENAIRE DE LA NAISSANCE DE VICTOR SCHOELCHER LA VISITE DU MINISTRE DE L’OUTRE-MER, BRIGITTE GIRARDIN, ET DU MINISTRE DES RELATIONS DU TRAVAIL, GERARD LARCHER, LE VENDREDI 8 OCTOBRE 2004 _______________ DISCOURS DE MADAME BRIGITTE GIRARDIN, MINISTRE DE L’OUTRE-MER

Monsieur le Ministre, Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, Mesdames et Messieurs les élus, Mesdames et Messieurs, Chers amis,

Je suis particulièrement heureuse d’être avec vous ce soir pour rendre hommage ensemble à l’une des plus grandes figures de la République. Victor Schoelcher, par son œuvre politique et par les valeurs humanistes qu’il a portées tout au long de sa vie, a su, en effet, donner tout son sens aux idéaux républicains.

Victor Schoelcher pour reprendre les mots d’Aimé Césaire " dépasse l’abolitionnisme et rejoint la lignée de l’homme révolutionnaire : celui qui se situe résolument dans le réel et oriente l’histoire vers sa fin ".

Que reste-t-il en effet de l’œuvre de la révolution de 1848 ? Sinon principalement comme l’écrit toujours Césaire " la suppression de cette institution qu’une barbarie civilisée avait pendant deux siècles, instaurée et maintenue sur le continent américain : l’esclavage des noirs ". Et quel plus beau symbole que la date du 20 mai 1949 qui vit Félix Eboué et Victor Schoelcher entrer ensemble au Panthéon !

L’oubli n’est pas une vertu républicaine. Et vous le savez, depuis quelques années déjà, sous l’impulsion du Chef de l’Etat, la République travaille à rompre le silence et à engager le nécessaire travail de mémoire sur les tabous et les silences du passé.

La France d’outre-mer a elle-aussi un droit à la mémoire.

Notre pays a tiré profit, pendant près de trois siècles, de la traite et de l’esclavage. Et nous nous devons aujourd’hui de rappeler aux générations actuelles et futures les atrocités de ce crime contre l’Homme : la saignée et l’appauvrissement de l’Afrique, le commerce de la traite, la déportation et le système esclavagiste installé par l’Europe aux Amériques.

Rappeler à la Nation son devoir de mémoire, c’est commémorer Victor Schoelcher et son œuvre. Comme nous le faisons aujourd’hui. C’est aussi se souvenir que l’abolition de l’esclavage est le résultat d’une lutte exemplaire d’hommes, qui ont résisté à leur condition d’esclave, qui ont sans relâche combattu pour la conquête de la liberté et de l’égalité. Ils ont donné au monde un bel exemple du combat pour le respect des droits de l’Homme. Saluer les révoltés et les marrons, les Delgrès, Ignace, Louverture, Solitude, c’est aussi mesurer ce que leur exemple nous enseigne.

Seules la mémoire et la réflexion sur les conditions historiques de ce passé difficile et douloureux peuvent fonder notre engagement de citoyens contre les barbaries d’aujourd’hui et de demain.

Aussi la France a-t-elle reconnu l’esclavage comme un crime contre l’humanité. Et j’ai donné une suite concrète à cette initiative en installant le 8 avril dernier le comité pour la mémoire de l’esclavage. Ce comité, présidé par Maryse Condé, a pour principale mission, et c’est à mes yeux essentiel, de proposer des mesures d’adaptation des programmes d’enseignement scolaire pour mieux apprendre à notre jeunesse ce que furent réellement la traite et l’esclavage. Il doit aussi proposer une date de commémoration annuelle de l’abolition de l’esclavage en France métropolitaine, suggérer des programmes de recherche en histoire, soumettre des actions de sensibilisation du public, et identifier les lieux de mémoire.

Les populations d’outre-mer attendaient de l’Etat français une telle reconnaissance, afin d’en finir avec un passé encore trop lourd. Cette reconnaissance de l’Histoire permettra une relation plus apaisée avec la métropole.

Au-delà même de l’existence d’une France d’outre-mer, notre pays voit cohabiter sur son sol différentes mémoires, tout à la fois singulières et croisées. Jamais sans doute la société française n’aura été autant bousculée ces dernières années par la remémoration de souffrances collectives : déportation des juifs de France, guerre d’Algérie, traite et esclavage des noirs. Jamais non plus les drames de l’Histoire n’auront été autant agités au profit d’affirmations identitaires exclusives. Jamais, hélas ! la concurrence des mémoires n’aura été aussi vive.

Le cloisonnement des mémoires nous rend souvent incapable à comprendre la part d’universel que contient chacune des expériences historiques vécues.

La République doit donc conduire cet indispensable travail de mémoire, en réhabilitant et en transmettant les mémoires croisées, et parfois conflictuelles, de toutes les populations qui forment notre Nation.

Pour consolider la communauté nationale, pour construire notre destin commun, nous devons faire partager à tous les citoyens français l’ensemble des mémoires qui font la France d’aujourd’hui.

Mesdames et Messieurs,

En ces temps incertains, la volonté commune d’honorer les valeurs humanistes qui font la force de notre nation, sont la meilleure réponse aux actes intolérables auxquels notre pays est parfois confronté. C’est pourquoi je me réjouis encore de l’initiative de la commune de Houilles d’honorer les deux cents ans de la naissance d’une grande personnalité républicaine. Je veux vous témoigner une nouvelle fois de mon soutien et de mon amitié dans ces temps de mémoire, et de rassemblement autour de valeurs communes, si importants pour notre Nation.


 

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