Lettre d’introduction

Monsieur le Premier ministre,

Le Comité pour la Mémoire de l’Esclavage, officiellement institué par le décret du 5 janvier 2004, et installé par la ministre de l’Outre-mer Brigitte Girardin le 8 avril 2004, a l’honneur de vous remettre son premier rapport. Outre le bilan de ses activités, ce document présente des propositions et recommandations issues des apports de chacun de ses membres, enrichis par des consultations. Ces propositions sont de nature à faire en sorte que la mémoire partagée de l’esclavage devienne partie intégrante de la mémoire nationale.

Nous avons ainsi consulté les représentants de l’outre-mer au Parlement, les élus des collectivités territoriales concernées, des associations ainsi que des personnalités qualifiées. Nous avons nourri notre réflexion de l’analyse des programmes et des manuels scolaires, d’un bilan des recherches sur la traite négrière, l’esclavage et leurs abolitions et d’une information sur ce qui était réalisé en matière de réparation historique et de création de lieux de mémoire dans des pays européens ayant aussi pratiqué la traite négrière.

De nos travaux, le constat suivant peut être établi :
il existe une forte attente, au-delà de tous les clivages, pour un acte symbolique fort et pour des actions concrètes de la part des plus hautes autorités de la République française qui s’inscrivent dans l’esprit de la loi du 21 mai 2001.

Cette attente s’explique par le fait que la très grande majorité de nos concitoyens du monde issu de l’esclavage sont convaincus que, malgré la loi du 21 mai 2001, l’histoire de la traite négrière, de l’esclavage et de leurs abolitions continue d’être largement ignorée, négligée, marginalisée. Ces concitoyens perçoivent cet état de fait comme un déni de leur propre existence et de leur intégration dans la République. En tant que citoyens, ils demandent que soit reconnu un passé qui a modelé non seulement leurs sociétés, mais aussi la France dans son ensemble. Conscientes de l’importance des questions abordées dans ce débat, les personnes rencontrées ont toutes souligné que cette reconnaissance devait se traduire, notamment, par un geste symbolique de l’État français et par la prise en compte à part entière de cette histoire, présentée comme un événement majeur de l’histoire de France, dans les programmes scolaires. Ces gestes contribueront à une plus grande intégration citoyenne.

Cependant, nous avons aussi constaté une certaine polarisation autour des enjeux de la mémoire, une approche polémique du débat autour de la traite négrière, de l’esclavage et de leurs abolitions. Cette polémique s’appuie sur ce sentiment largement partagé par nos concitoyens que leur histoire n’est pas « prise en compte », que l’esclavage reste une question « mineure » dans l’histoire et la mémoire nationales. Il ne s’agit pas de dramatiser, mais c’est le devoir de tous ceux qui exercent une responsabilité d’être clairvoyants. Ils doivent opposer à ces approches polémiques un discours sans ambiguïté et des actes forts qui manifestent la volonté de la République française d’aborder cette page honteuse de son histoire.

C’est en tenant compte de ces attentes que nous avons formulé les propositions qui figurent dans ce rapport et que nous allons vous présenter. Nous allons poursuivre notre tâche dans les quatre prochaines années. Nous voulons remercier le ministère de l’Outre-mer, qui nous a reçus et a toujours cherché à faciliter nos travaux.

Tous les membres du Comité ont conscience de l’extrême importance de leur mission et de l’opportunité qui leur est offerte. Je veux les remercier de leur dévouement et de leur compétence. C’est pour moi une grande fierté de présider ce comité.

Je tiens, Monsieur le Premier ministre, à l’issue de la première année de notre mission, à vous assurer de mon estime, et, au nom de tous les membres du Comité, à vous remercier de la confiance que vous nous avez manifestée.

Maryse Condé


 

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